Ep. 13 - Gilles Colinet et Simon Jousset de la Forteresse de Berrye

Qu’est-ce qui transforme une simple visite en un moment inoubliable ?

Dans cet épisode, direction la Forteresse de Berrye, un lieu hors du temps niché dans le Val-de-Loire, où Gilles Colinet et Simon Jousset ont choisi de faire les choses autrement.

Ici, pas de visite figée ou de parcours standardisé.


On vous reçoit comme un invité, on adapte chaque rencontre, on raconte, on partage… et parfois même, on déjeune ensemble dans les anciennes cuisines.

Ils nous parlent de leur vision de l’accueil, du lien avec les visiteurs, de la place de l’émotion, et de la magie qui naît dans une dégustation à la lumière des souterrains troglodytes.

Un épisode inspirant pour tous ceux qui croient que le patrimoine se vit autant qu’il se visite.


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📆 Événements à venir à la Forteresse de Berrye :

Samedi 24 mai : Journée Médiévale ! Vivez une journée immersive sur le thème du Moyen Âge – animations, artisanat, chants, combats, dégustation.

Samedi 28 juin 2025 : concert baroque exceptionnel avec le Trio Owon, dans la salle seigneuriale de la forteresse.

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Transcript

Mirabelle
Une visite personnalisée, presque sur mesure, n'est-ce pas l'ultime expérience visiteur ? Les faire se sentir comme attendus et leur réserver un accueil toujours plus proche de vous. Plus que des visiteurs, ils sont vos invités. C'est la démarche de plus en plus menée par les propriétaires et gestionnaires de sites patrimoniaux. Faire perdurer ces sites majestueux en révélant leurs secrets. Histoires de famille, passions, ancêtres, coulisses de rénovations et anecdotes font désormais partie des éléments expérientiels de nombreux lieux qui regorgent de vestiges historiques tels que les châteaux, grottes et forteresses.

Pauline
Pour approfondir ce sujet, nous avons demandé à Gilles Colinet et Simon Jousset, respectivement propriétaire et bras droit de la Forteresse de Berrye, de nous partager leur vision d'une expérience personnalisée. Mais jusqu'où tous deux vont-ils pour recevoir plutôt qu'accueillir ? Et comment tentent-ils de redonner vie à ce site historique et viticole, avec l'ambition assumée de faire de ce lieu perdu du Val-de-Noir un domaine de renom ? Bonjour Gilles, bonjour Simon.

Simon
Bonjour Pauline, bonjour Mirabelle, et merci de nous recevoir.

Mirabelle
Bienvenue sur le podcast Visiteurs 360, les coulisses de l'émotion. Nous sommes ravies de vous recevoir pour cet épisode. Avant de répondre à toutes ces questions, on aimerait faire appel à vos souvenirs en tant que visiteurs : pouvez-vous partager un souvenir de visite où vous avez ressenti une émotion forte ?

Gilles
Je commence. Il y a de nombreux sites pour lesquels j'ai des souvenirs émus et forts : la Sainte-Chapelle, le Mont-Saint-Michel, les grands sites d'Andalousie, les jardins du Généralife... c'est difficile à expliquer. La plaine du million de pagodes à Pagan, en Birmanie, par exemple. Ce sont souvent des lieux avec une grande spiritualité ou des jardins exceptionnels. Et c'est toujours plus marquant quand on les visite seul, ou dans des conditions particulières.

Simon
Moi aussi, les lieux spirituels m'ont toujours marqué. Un de mes souvenirs forts, c'est la Mezquita de Cordoba, la mosquée-cathédrale de Cordoue. J'ai eu la chance de la visiter de nuit, lors d'une visite organisée avec des jeux de lumières. C'était exceptionnel. Et le petit groupe donnait un côté très intimiste. On avait l'impression d'emprunter une porte dérobée, de découvrir le lieu partie par partie. Ça créait une vraie émotion.

Leur parcours jusqu'à Berrye

Pauline
C'est intéressant, vous avez tous les deux évoqué des sites patrimoniaux. Restons dans cet esprit en parlant de la Forteresse de Berrye. Mais avant tout, parlons un peu de votre parcours. À vous deux, vous êtes vigneron, hôte, conteur, commercial, chef d'entreprise, communicant... Racontez-nous votre chemin jusqu'à Berrye.

Gilles
J'ai 65 ans, et une vie professionnelle riche et variée. Je suis ingénieur agronome de formation, originaire de Bretagne, et j'ai travaillé dans différentes sociétés, souvent proches de l'agroalimentaire. Dans la seconde partie de ma vie, j'ai été chef d'entreprise : pépinières, laboratoire in vitro... Puis j'ai tout revendu récemment, avec à cœur de reprendre un domaine viticole avec quelques vieilles pierres. C'est ainsi que je suis tombé amoureux de la Forteresse de Berrye, fin 2019. Évidemment, ce projet se fait avec mon épouse, qui y joue un rôle essentiel.

Pauline
C'est Sandra, d'ailleurs, qui a fait le lien entre vous et nous pour ce podcast. Sans elle, cette rencontre n'aurait pas eu lieu.

Gilles
Oui, et je dois dire que ce projet de retraite active est plus intense que prévu. Je travaille sans doute plus qu'avant ! Heureusement que Simon est là pour m'épauler, moralement et concrètement.

Pauline
Simon, à ton tour. Quel est ton parcours et comment es-tu arrivé à Berrye ?

Simon
J'ai 31 ans, et un parcours un peu atypique. Formation commerciale au départ, puis une période de recherche de sens. Je me suis réorienté vers le vin, non pas tant pour le breuvage que pour le patrimoine. J'ai repris mes études en marketing des vins de terroir à l'ESA d'Angers, et j'ai eu la chance de faire mon alternance à Berrye, dès le début du projet avec Gilles. C'était fin 2021. Depuis, je suis resté engagé dans l'aventure.

Mirabelle
Une belle rencontre, donc.

Simon
Oui, absolument.

La découverte de la forteresse

Mirabelle
Gilles, comment avez-vous découvert la Forteresse de Berrye ? Qu'est-ce qui vous a plu dans ce lieu ?

Gilles
Je cherchais un domaine viticole avec du caractère. Un jour, je tombe sur une photo dans un magazine : la majestueuse Aula, cette grande salle de réception médiévale. Elle m'est restée en tête. Un an plus tard, je retombe par hasard sur l'annonce. Je visite. Coup de cœur. Mais un acheteur anglais semble déjà intéressé. Finalement, la vente ne se fait pas. Neuf mois plus tard, on m'appelle : "Le lieu est à vous si vous le souhaitez."

Mirabelle
Qu'est-ce qui rend la forteresse unique ?

Gilles
Elle est essentiellement médiévale, ce qui est rare dans le Val de Loire, dominé par la Renaissance. Il y a aussi des campagnes de restauration du XIXe siècle, notamment par Monseigneur de Dreux-Brézé, évêque de Moulins. Il y a une austérité, mais aussi beaucoup de délicatesse : la chapelle, la cour haute, le village troglodyte... C'était comme une belle endormie. Il fallait la réveiller.

L'accueil à la forteresse : recevoir, pas juste accueillir

Mirabelle
Vous proposez de nombreuses activités à la Forteresse de Berrye : hébergement, mariages, concerts, dégustations... Mais toujours avec la même exigence de personnalisation. Qu'est-ce que cela change concrètement dans votre manière d'accueillir les visiteurs ?

Simon
On veut apporter un ton différent, plus informel, plus personnel. Les visites ne sont pas standardisées : chacun de nous (Gilles, Sandra, Juliette ou moi) adapte selon sa sensibilité et les personnes en face. C'est plus une discussion qu'une visite guidée. Cela vaut aussi pour les dégustations, les événements. On essaie de créer du lien, du sur-mesure, dans un cadre convivial.

Mirabelle
Et ça se voit dans les avis : vos visiteurs citent souvent la personne qui leur a fait la visite. Le lien humain est très présent.

Simon
Oui, et pour l'instant, notre fréquentation permet cette approche intime. On reçoit surtout des petits groupes, ce qui facilite le contact. Et on espère garder cela, même si la notoriété grandit.

Gilles
Les gens s'intéressent à notre histoire, à la restauration, à nos choix. Ils tombent parfois sur nous en train de travailler ou de déjeuner, et on les accueille comme des amis de passage. Ce n'est pas toujours simple à gérer, mais c'est notre réalité. On vit sur place, et cela se ressent dans l'accueil.

L'accueil à la forteresse : recevoir, pas juste accueillir

Mirabelle
Vous proposez de nombreuses activités à la Forteresse de Berrye : hébergement, mariages, concerts, dégustations... Mais toujours avec la même exigence de personnalisation. Qu'est-ce que cela change concrètement dans votre manière d'accueillir les visiteurs ?

Simon
On veut apporter un ton différent, presque un peu informel, plus personnel, plus familier. Là, je vais parler plutôt des visites pour que ce soit un peu plus concret, mais en fait, on est plusieurs à pouvoir faire les visites, que ce soit Gilles, Sandra, même Juliette, notre alternante en master tourisme et histoire, ou moi-même. On va vraiment adapter notre visite aussi, selon nous, nos compétences, nos connaissances, et puis surtout on va vraiment avoir cette idée de mettre en confiance les visiteurs et tout de suite de créer un lien. Et vraiment, on sort un petit peu des visites guidées standardisées qu'on peut trouver dans la majorité des sites historiques. Donc nous vraiment, c'est ça notre objectif. En tout cas, moi je sais que j'expérimente comme ça, c'est que j'essaie que ça devienne plus une interaction, vraiment presque une discussion en fait, plutôt qu'une visite guidée avec une trame très rigide.

On a plus ou moins, je trouve, cette démarche dans tous les aspects, même que ce soit au niveau du vin, de la dégustation, dans notre approche aussi de gérer l'événementiel ici, les mariages. On va vraiment voir ce côté où on essaie de créer quelque chose de supplémentaire et surtout de vraiment créer quelque chose de très personnel.

Mirabelle
Oui, mais d'ailleurs, ça se ressent. Je regardais un peu les avis Google sur la Forteresse de Berrye. Dans la très grande majorité, les gens mentionnent la personne qui leur a fait visiter. Donc, il y a vraiment ce lien qui est créé entre vous et les visiteurs. À chaque fois, la personne est vraiment citée, que ce soit Gilles, Simon, Juliette. Effectivement, je l'ai vue plusieurs fois, Juliette. Donc c'est vrai que c'est intéressant. Vous arrivez vraiment à créer cette interaction dont tu parles, Simon ?

Simon
C'est vraiment l'objectif. Après, c'est vrai que la fréquentation du site et pour l'instant notre contexte aussi facilitent vraiment cette approche. Après, il faudra voir aussi à terme, si on commence à gagner un petit peu en notoriété, est-ce qu'on veut la garder ? Mais dans la tête de tout le monde, oui. Mais c'est vrai qu'on a souvent des visites où on va avoir des couples ou des petits groupes. Et c'est vrai que tout de suite, déjà, ça facilite vraiment ce contact qu'on essaie de mettre en place.

Gilles
Oui, alors on voit également que les gens s'intéressent aussi à notre aventure, si vous voulez. Donc, ils nous posent beaucoup de questions sur la restauration, sur pourquoi on s'est lancé là-dedans. Ils sont d'ailleurs souvent... Enfin, ce qui... parce qu'on leur parle beaucoup évidemment du processus, de tout le parcours de restauration et du projet. Et alors souvent la réflexion principale qu'ils ont, et qui finit par être décourageante d'ailleurs, c'est de dire : « Oh là là, qu'est-ce que vous êtes courageux de vous lancer là-dedans à votre âge ! » Non, non, il ne faut pas. Ça reste assez normal quand même. Mais en tout cas, c'est vrai qu'aujourd'hui les choses ne sont pas standardisées. Alors on a des gens qui réservent, bien sûr, surtout les groupes, etc. On est obligés. Mais quelque part, ils nous interrompent, sans que ce soit du tout négatif, dans nos activités quotidiennes. Ils nous surprennent en train de repeindre un truc, d'aller travailler dans les vignes. Donc en fait, ils rentrent au milieu un peu de notre activité, de notre vie quotidienne. Je me rappelle par exemple aussi d'un cas où on était en train de déjeuner tranquillement avec Sandra, en haut là, sur notre galerie, et puis on voit des gens qui rentrent dans la cour haute, et ils disent : « On voudrait visiter. » Alors on leur demande la permission de finir notre repas. Il ne faut pas que ce soit toujours comme ça, parce que bien entendu, à un moment donné, ça devient difficilement gérable. Mais je pense qu'ils sont assez surpris de rentrer chez nous et qu'on les accueille un peu comme si c'était des visiteurs de passage.

Mirabelle
Ils entrent dans un lieu de vie, ce n'est pas juste un lieu de visite.

Gilles
Oui, oui, tout à fait. De toute façon, un lieu comme ça, l'objectif, c'est qu'il vive ou plutôt qu'il revive, parce qu'on peut imaginer que dans le passé... il y avait beaucoup d'habitants, il y avait les seigneurs, il y avait les gens qui travaillaient, il y avait les militaires, il y avait les agriculteurs. Donc il faut imaginer une vie trépidante dans ces lieux-là, avec notamment dans les troglodytes des tas de gens qui vivaient, qui faisaient le vin. Donc l'idée de faire, évidemment modestement, mais renaître un tout petit peu ça, c'est assez gratifiant.

L'émotion, la personnalisation et l'imaginaire comme leviers d'expérience

Pauline
En préparant cet échange, Gilles, vous nous avez dit que vous ne vouliez pas devenir une "usine à visite". Vous parlez de vos visiteurs comme d'invités. C’est une posture que partage aussi Charlotte Elie à la Maison Gainsbourg. Elle expliquait vouloir recevoir comme si elle accueillait des amis à dîner. Est-ce aussi ce que vous cherchez à faire vivre à Berrye ?

Gilles
L’une des façons de faire déjà, c’est de s’intéresser aux gens. On peut le faire quand ils ne sont pas trop nombreux. On essaie de savoir qui ils sont, d’où ils viennent, comment ils nous ont connus. Cela entame un dialogue. Et du coup, on trouve toujours des points communs, des choses à partager. Ce n’est pas une répétition d’une visite standardisée. On n’est pas du tout dans le fast-food du patrimoine. Et le fait qu’on ne fasse pas de visite libre, parce qu’on n’a pas encore les moyens de le faire, renforce ce lien.

On propose souvent des déjeuners simples avec des planches-repas. Et là, on a eu des groupes espagnols, hollandais, qui viennent à 10-12 personnes. Je pense qu’ils ont vraiment l’impression d’être à la maison. On les installe dans les anciennes cuisines, dans les grandes salles de dégustation. Ça donne l’impression qu’ils sont invités chez nous. Ce n’est pas tout à fait la même chose que recevoir des amis, mais ça s’en rapproche.

Personnalisation de l'expérience et émotion dans la visite

Mirabelle
Et est-ce que certains des visiteurs viennent avec des demandes ou des attentes particulières quand ils viennent visiter la forteresse ?

Simon
Oui, souvent. C’est généralement soit pour l’aspect patrimonial, soit pour le côté viticole. Mais il y a une vraie synergie entre les deux, et les visiteurs le ressentent tellement pendant la visite que l’un ne va presque jamais sans l’autre. C’est très rare qu’on fasse juste visiter sans déguster, ou juste déguster sans visiter.

Et puis, la personnalisation des visites est assez naturelle, je pense. D’une part, parce qu’il y a cette dimension intimiste dont on a déjà parlé, mais aussi parce que le lieu et le projet évoluent constamment. Que ce soit Gilles, Sandra, Juliette ou moi-même, chacun apporte sa sensibilité. Les gens peuvent venir chaque année, ils ne vivront jamais la même visite. C’est un vrai argument pour nous. Vous pouvez venir à tout moment, on sera toujours heureux de vous recevoir, et les visites sont toujours adaptées : au profil, à vos envies, au guide qui vous accueille.

Mirabelle
Les coulisses de l’émotion. Les gens peuvent venir sans réserver pour visiter le lieu ?

Gilles
Il vaut mieux réserver, car il arrive que nous ne soyons pas là. Ce n’est pas impossible de venir à l’improviste, surtout en haute saison, mais une réservation permet de mieux organiser la visite, d’éviter les groupes trop nombreux en même temps. On a des publics très différents : des clubs des Nos Logis, des amateurs de gastronomie française, ou même des groupes pour des enterrements de vie de jeune fille ou de garçon. Ce n’est pas du tout la même manière de faire ! On adapte la visite, on leur montre d’autres lieux, on va dans les profondeurs des grottes, bref, on personnalise selon le type de visiteurs.

Mirabelle
Et vous faites du sur-mesure.

Gilles
Oui, mais à l’inspiration. On ajuste sur le moment, selon les personnes présentes.

Mirabelle
Donc du sur-mesure, mais spontané, en fonction des invités. C’est vraiment une expérience humaine, avec une grande interaction. On se demandait justement, dans ce lieu chargé d’histoire et d’héritage, comment vous utilisez cette richesse pour créer une expérience émotionnelle ? Est-ce qu’il y a des moments ou des anecdotes qui déclenchent systématiquement des réactions fortes ?

Simon
Oui, il y en a plusieurs. Le lieu parle de lui-même. Dès qu’on entre dans la grande salle seigneuriale, l’Aula, on a souvent des réactions d’émerveillement. L’empreinte de la cheminée, qui a été démontée et vendue au début du XXe siècle, impressionne beaucoup aussi. Il y a des anecdotes marquantes : un ancien propriétaire qui cherchait un trésor s’est retrouvé coincé dans les souterrains, il a dû appeler à l’aide pour en sortir…

On a aussi une girafe naturalisée dans la grande salle, ce qui est assez inattendu ! Elle s'appelle Sacha, elle vient du Bioparc de Doué-la-Fontaine, tout près d’ici. Elle appartenait au patriarche du troupeau, et Gilles l’a offerte à Sandra pour son anniversaire, car elle adore les girafes. Cet élément détonnant étonne beaucoup, surtout les enfants.

Pauline
Il y a beaucoup de dimensions personnelles dans cette forteresse.

Simon
C’est ce qui renforce encore plus le côté intimiste. Et puis, il y a tout ce qui concerne le vin. La visite des chais est un moment marquant : le chai à barriques, avec toutes les barriques alignées dans les souterrains, fascine. Les visiteurs aiment prendre des photos, ils posent beaucoup de questions. Lors des dégustations, selon leur sensibilité, on va plus ou moins loin. J’essaie parfois de les initier à la dégustation professionnelle si je sens que c’est le bon moment.

Mais l’essentiel, c’est de décomplexifier l’expérience. Le vin, ça peut sembler technique, alors que nous, on garde un cadre convivial, comme si on buvait un verre avec des amis. C’est cette atmosphère qu’on cultive.

Pauline
Vous parliez du lien entre visite et dégustation. En fait, c’est presque automatique. On vient pour visiter et on déguste, ou inversement. Finalement, ça mobilise plusieurs sens :

Mirabelle
La vue...

Pauline
Le goût...

Mirabelle
Et les odeurs, dans les sous-sols, avec les barriques.

Pauline
Oui, c’est une vraie expérience multisensorielle. Vous en parlez aux visiteurs ?

Gilles
Je ne sais pas si on le dit explicitement, mais je pense que ça se ressent. Les chais sont troglodytiques : il y fait frais l’été, doux l’hiver. On y fait des dégustations directement dans les barriques, ce qui marque beaucoup. Peu de domaines proposent ça. C’est un souvenir fort. Et puis, ce lieu se découvre en étapes, avec des ambiances très différentes : la cour basse agricole, la cour haute mystique et refermée, les souterrains mystérieux. Il y a des éléments dont on ne connaît pas la fonction, ni même l’époque : peut-être antérieurs au château. Le lieu est plein de mystère.

Des scientifiques s’interrogent encore sur certaines structures. On ne peut pas dérouler un fil historique continu. Il y a des zones d’ombre, mais ça nourrit l’imaginaire.

Mirabelle
Et tout ça, c’est vous qui le racontez, à l’oral ?

Gilles
Oui. Il n’y a pas encore de médiation écrite. Et chacun, que ce soit Juliette, Sandra, Simon ou moi, raconte avec ses mots. Il y a un vrai mystère entre le XIIe et le XIXe siècle. On ne sait pas exactement ce qu’il s’est passé. Mais il s’est passé beaucoup de choses, c’est certain.

Pauline
Donc vous laissez aussi de la place à l’imaginaire ?

Gilles
Absolument. Et c’est un lieu en pleine nature, encore très agricole, très préservé. C’est aussi ce qui le rend magique.

Les émotions recherchées et l’héritage vivant

Pauline
Les coulisses de l'émotion. Vous le savez, vous avez bien compris la thématique phare de Visiteurs 360 : ce sont les émotions, et plus particulièrement celles que les exploitants de sites comme vous cherchent à faire vivre à leurs visiteurs.

Nous allons terminer cette interview avec une dernière question pour vous deux, Gilles et Simon : quel type d’émotion cherchez-vous à faire vivre à vos visiteurs ou à vos invités ? Vous pouvez répondre en un mot, une phrase, ce qui vous vient.

Simon
Toutes sortes d’émotions positives ! Mais moi, ce que j’aime vraiment provoquer, c’est l’émerveillement. C’est ce que je recherche dans le regard du visiteur. Et je trouve que c’est aussi une manière de revivre, encore et encore, la découverte des lieux. C’est ce qui fait que je ne me lasse jamais des visites. Chaque visite est une redécouverte, un nouveau regard, et ça me reconnecte à la magie de ce lieu chargé d’histoire et de mystère.

Gilles
Oui, tout à fait. Il y a une vraie dimension d’héritage, comme le disent les Anglais. On est dans un lieu bâti il y a plus de 800 ans par nos ancêtres. Il y a une continuité, une filiation. Et dans une époque où beaucoup de gens sont un peu perdus, ne savent plus trop d’où ils viennent, ce genre de lieu permet de se reconnecter à quelque chose de plus profond. Et on sent que ça touche les gens, que ça les rend fiers.

Il y a aussi, bien sûr, tout ce que vous transmettez à travers le vin : un vrai savoir-faire, une culture. Comme le disait votre prédécesseur : « Visitez la forteresse, et vous comprendrez les vins. »

Pauline
C’est très joli, ça. Moi, je n’ai pas encore eu la chance de visiter cette forteresse, alors que je ne suis pas très loin de chez vous !

Gilles
Vous êtes invitée !

Pauline
C’est vrai que je me suis presque invitée toute seule ! Invitation acceptée avec grand plaisir.

Mirabelle
Lémerveillement, et peut-être aussi la reconnexion. Reconnexion à soi, aux autres, à un lieu, à une histoire. Ce sont des émotions que, je crois, chaque visiteur espère vivre. Et c’est ce qu’on s’efforce de leur offrir.

Pauline
Je suis certaine que vous y parvenez, et que vous menez ce beau projet avec brio. Dans cet épisode, on a parlé de beaucoup de choses, mais surtout, on a remplacé le mot visiteur par invité.

Quand on parle d’expérience visiteur dans des sites à taille humaine, on revient à cette notion de proximité, de presque sur-mesure, qu’on a d’ailleurs bien retrouvée ici. C’est une relation très différente de celle qu’on peut vivre dans de grands parcs ou les monuments très connus comme Chambord. Les personnes qui choisissent de venir à la Forteresse de Berrye veulent vivre quelque chose de différent. Elles veulent être reçues, rencontrer les gens qui font vivre ce lieu, pas juste « consommer » une visite.

C’est ce que je retiens de votre offre : cette magie expérientielle où chaque détail compte, où la proximité et la qualité priment sur la quantité.

Ici, dans le podcast et chez Ligne de Myr, on a vraiment à cœur de valoriser toutes les formes d’expérience visiteur. On est ravies d’avoir pu explorer la vôtre, si singulière et chaleureuse. Merci beaucoup pour cet échange.

Simon
Merci à vous.

Gilles
Merci !

Mirabelle
Merci Pauline, merci à tous. À bientôt à la forteresse !

Pauline
Et c’est ainsi que se termine l’épisode 13 de Visiteurs 360. Merci à nos invités, Simon Jousset et Gilles Colinet de la Forteresse de Berrye, d’avoir partagé avec nous votre vision de l’expérience visiteur.

Visiteurs 360, c’est un mardi sur deux sur votre plateforme d’écoute préférée : Amazon, Apple Podcasts, Deezer et autres. Si cet épisode vous a plu, laissez-nous des étoiles, des commentaires, et surtout, parlez-en autour de vous ! Ce n’est pas un ordre… mais ça nous ferait vraiment très plaisir.

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