Ep. 23 - Alexandre Petry du Parc de Branféré

Créer l’émotion sans perturber le vivant : le pari du parc de Branferé

Offrir une expérience dans un parc animalier sans (ou presque) montrer les animaux, c’est possible ?

Pour cet épisode, direction le Morbihan, au cœur d’un lieu qui ne ressemble à aucun autre. Un parc animalier sans cages, un jardin botanique, une école de la nature, un parc de jeux dans les arbres… et désormais une expérience nocturne où les animaux disparaissent pour laisser la lumière, le son et la poésie guider les visiteurs.

Avec Alexandre Pétry, directeur zoologique et scientifique du Parc de Branferé, on plonge dans les coulisses d’une innovation rare : un parcours nocturne qui choisit de ne pas montrer les animaux pour mieux préserver leur bien-être.

Une décision audacieuse, née d’un récit sensible autour des lucioles et de quatre gardiens symbolisant les missions fondatrices du parc : comprendre, prendre soin, transmettre et protéger.

Un épisode lumineux, où l’on découvre qu’émerveiller ne veut pas dire montrer… mais raconter, relier, et faire ressentir autrement.

Écoutez dès maintenant et découvrez comment créer des expériences qui transforment le spectateur en participant :

 

À propos d’Alexandre Pétry :

Ethologue de formation, Alexandre est directeur zoologique et scientifique du Parc de Branféré dans le Morbihan. Passionné par la nature et sa protection, il a décidé de s’investir pleinement dans la conservation via les parcs zoologiques : élevage ex-situ, soutien à des actions sur le terrain, sensibilisation du public, recherches fondamentales et appliquées avec nos pensionnaires.

“Au Parc, j’ai l’occasion de faire toutes ces missions et bien plus grâce à un cadre exceptionnel
et une équipe aux petits soins pour les animaux !”

🙋🏽‍♀️ Un grand merci à Clément Duparc de Tribus Echoes Production pour la création unique de notre identité musicale : https://tribusechoesproduction.com/

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Transcript

Créer l’émotion sans perturber le vivant : le pari nocturne de Branferé avec Alexandre Pétry

Pauline : Nous sommes Pauline et Mirabelle, les fondatrices de Line de Mir, un duo d'expertes en marketing et communication dédié au secteur du loisir et de la culture.

Mirabelle : Vous écoutez le podcast Visiteur 360, les coulisses de l'émotion. Et ici, nous partageons avec nos invités deux passions.

Pauline : La passion du secteur où l'émotion est au centre de tout.

Mirabelle : Mais aussi celle de ses coulisses, pour rendre l'expérience visiteur inoubliable, aussi bien avant, pendant qu'après la visite.

Pauline : Vous êtes prêts ? C'est parti !

Alexandre Pétry : Et je pense que c'est par la transparence qu'on arrivera à garder nos visiteurs.

Pauline : Alors, aujourd'hui, direction le Morbihan.

Mirabelle : Au cœur d'un lieu pas comme les autres, le Parc de Branféré. Et ce n'est pas qu'un parc, c'est un parc animalier, un jardin botanique, un parc de jeux dans les arbres et une école de la nature. Et tout cela dans un même domaine, rien que ça. Depuis octobre, le Parc de Branféré a aussi lancé les Nuits de Branféré, une expérience nocturne où les animaux laissent place aux lucioles, aux sons et à la poésie. Un parcours poétique où le storytelling prend le pas sur le spectaculaire et où le parc explore une nouvelle façon d'émerveiller sans déranger la faune.

Pauline : Et pour l'épisode 23, nous avons le plaisir de recevoir Alexandre Pétry, directeur zoologique et scientifique du Parc de Branféré. Ensemble, nous allons parler d'innovation douce, de storytelling sensible et de la façon dont un lieu peut transmettre des émotions fortes tout en éveillant les consciences. Alexandre va nous partager comment Branféré repense l'expérience du visiteur tout en restant fidèle à sa mission première, le bien-être animal. Alors bienvenue sur Visiteur 360, les coulisses de l'émotion. On embarque vers le monde des parcs animaliers. Salut Alexandre !

Alexandre Pétry : Bonjour Pauline, bonjour Mirabelle !

Mirabelle : Bonjour Alexandre !

La visite personnelle marquante de Singapour

Pauline : Alors, pour commencer en douceur et partager un moment plus personnel avec nos auditeurs, peux-tu nous raconter la visite d'un lieu pour lequel tu as ressenti une émotion forte ?

Alexandre Pétry : Alors, j'ai eu la chance il y a quelques mois d'aller à Singapour. Et du coup, déjà, rien que d'être à Singapour, c'est une expérience en soi. La forêt tropicale, enfin... La ville autour de la forêt tropicale ou la forêt tropicale autour de la ville, c'est un peu difficile à déterminer. Et en fait, il y a un lieu précis où j'ai vécu un moment fort. En fait, il y a un des parcs publics qui s'appelle Botanical Garden, en gros, le jardin botanique. Et j'allais dans ce parc pour une raison bien particulière. Donc, on descend du métro, donc hyper... hyper urbain, on arrive dans le jardin botanique, c'est un grand parc avec des grandes pelouses, des grands étangs, des arbres tropicaux et en fait en quelques secondes le but était déjà là et en fait il est connu pour accueillir une famille de loutres à pelage lisse, donc c'est une grosse loutre qui fait une dizaine de kilos, c'est une de mes espèces préférées et en fait en 5 minutes on les entend crier parce qu'elles font beaucoup de bruit quand elles se déplacent et il y a 10 loutres qui ont traversé l'allée devant moi et qui sont passées d'une zone forestière à l'étang. Et je pense que ça fait partie des gros moments de ce voyage et en tout cas des moments récents où j'ai vraiment ressenti des choses un peu fortes. Il y a deux choses. Il y a quand même la surprise et le contact, parce que c'est des animaux sauvages. Et un peu ce côté, c'est tellement facile. Parce qu'on est à Singapour et que la nature, elle est chez elle. Et c'est vrai que c'était un moment fort.

Mirabelle : Et puis, il y avait peut-être l'attente aussi, parce que tu dis que tu y allais dans ce but précis. Alors, je ne suis pas allée à Singapour. Non, pas à Singapour, mais au Jardin Botanique.

Alexandre Pétry : Ah oui, je suis vraiment allé à Botanical Garden, parce que je sais qu'il y a cette famille de loutres et qu'on voit assez facilement.

Mirabelle : Moi, j'aime bien les loutres, mais je n'en ai jamais vu. Alors, peut-être qu'il faut que j'aille à Singapour.

Pauline : Tu n'as pas de la famille à Singapour ?

Mirabelle : On a habité Singapour, mais je suis allée juste une fois. Et pour le coup, j'étais en décalage par rapport au reste de la famille. Je n'ai pas fait le botanical garden puisqu'ils l'avaient fait la veille.

Alexandre Pétry : Il y a plusieurs familles de loutres à Singapour. Il y a même des groupes d'aficionados qui les observent, qui notent. Il y a eu une série de vidéos avec les histoires des familles, les guerres de territoire et tout. Elles sont assez connues, les loutres de Singapour.

Mirabelle : Oui, c'est ça. Ce n'est pas n'importe quelles loutres. C'est les loutres.

Alexandre Pétry : C'est les loutres de Singapour.

Pauline : C'est ça l'espèce, ça s'appelle les loutres de Singapour.

Mirabelle : Les loutres à pelage lisse de Singapour. Ça donne envie, c'est sûr.

Le parcours professionnel d'Alexandre

Mirabelle : Et du coup, pour continuer, là, on va rentrer un peu plus dans le vif du sujet. Mais avant de parler vraiment des visiteurs, on va aussi parler de toi. Est-ce que tu peux nous raconter, nous résumer un peu ton parcours et comment tu es arrivé au Parc de Branféré ?

Alexandre Pétry : Alors, comme vous pouvez l'imaginer, une grande passion pour les animaux, un grand intérêt et surtout un grand intérêt pour comprendre comment ils vivent, comment on peut contribuer à leur conservation. Et en fait, en me renseignant...

Pauline : Pour comprendre les animaux, Alexandre entame des études d'éthologie. C'est la science des comportements des espèces animales dans leur milieu naturel. Une formation qu'il suit à Villetaneuse, avec des stages dans des parcs zoologiques bien connus. La ménagerie du jardin des plantes, le zoo de Thoiry entre autres. Pour finir ensuite, son master à Planète Sauvage, où il reste travailler pendant 5 ans. C'est au parc zoologique de Mulhouse, une institution très active dans ses missions scientifiques, notamment ex-situ, qu'il met en place des outils d'évaluation du bien-être animal. C'est lorsqu'une opportunité rêvée pour lui se présente au Parc de Branféré, un parc qu'il admire depuis longtemps. Il décide alors de traverser la France à nouveau pour s'établir dans le Morbihan et occuper le poste de directeur zoologique et scientifique. Un poste dans lequel il s'épanouit depuis déjà trois ans.

Description du poste actuel

Alexandre Pétry : Il y a beaucoup de choses dedans, mais pour résumer, en gros, c'est avoir la gestion du département zoologique, à la fois les animaux, donc à peu près 1500. Les personnes qui s'en occupent, une trentaine. Et surtout les infrastructures, que ce soit les bâtiments ou les habitats des animaux. Et pour résumer, c'est beaucoup de discussions, beaucoup de réunions, un petit peu de terrain pour passer du temps avec les animaux et puis toujours des moments magiques, observer des parades chez nos grues, les premiers pas d'un jeune gibbon ou d'un hippopotame. C'est quand même ça, le cœur du métier. Et pour un peu stopper l'évocation, je passe quand même beaucoup de temps dans un bureau ou autour d'une table de réunion.

Le Parc de Branféré : un concept unique

L'histoire du parc et la diversité des offres

Pauline : Et ouais, dans ton poste, il y a marqué direction et quand on a la direction, on perd un petit peu cette notion de terrain. Mais tu vas quand même nous parler de qu'est-ce qui se passe sur le terrain et puis qu'est-ce que vous promettez, qu'est-ce que vous offrez aux visiteurs. Et du coup, vient la troisième question au sujet du fait que vous, vous définissez aussi comme un concept assez unique en France, car vous réunissez le parc animalier, le jardin botanique aussi, le parcabout et l'école de la nature. Donc, ça fait quand même des offres très diverses. Comment ces dernières permettent-elles de créer des expériences visiteurs riches et surtout sans compromettre la mission que vous avez, qui est le bien-être animal, du coup ?

Alexandre Pétry : Alors, c'est vrai que quand on regarde de l'extérieur, le parc, c'est un peu un ovni en France. Et je pense que c'est lié à son histoire. Le parc, il a été créé il y a 60 ans par Paul et Hélène Jourde. C'étaient des voyageurs, des passionnés de nature, qui étaient vraiment déjà... Ils avaient une vision qui était différente à la fois de la nature, des animaux, de l'éducation. Et en fait, ils ont créé autour de ce petit château dans le Morbihan une sorte de jardin d'Éden avec, alors à l'époque, des animaux ramenés de voyage, mais qui étaient acclimatés, des animaux qui venaient d'autres parcs zoologiques aussi. On a retrouvé des traces du zoo de Buenos Aires, du zoo de Sydney, des échanges vraiment très lointains. Et en fait... Leur but, c'était d'avoir ces animaux en semi-liberté autour du château. Et avec la pression du public, parce qu'au début, c'était plutôt un rêve intime, ils ont ouvert et ils ont commencé à faire de la sensibilisation. Et déjà à cette époque, que ce soit Paul, Hélène ou leurs employés, ils se promenaient dans le parc et ils faisaient de la sensibilisation. Donc ça a toujours été un espace un peu ovni, un peu hybride où on laisse vivre la nature. C'est un jardin à l'anglaise avec des animaux et qui est un moteur d'éducation.

Alexandre Pétry : Alors bien sûr, ça s'est un petit peu professionnalisé. Je fais un saut dans le temps. Le parc, il a été légué à la Fondation de France. Donc c'est une fondation privée qui est plutôt axée normalement sur les... C'est une fondation qui repose sur la philanthropie, mais qui a plutôt des actions... on va dire, sur des projets. Et en fait, là, ils ont hérité d'une entité physique. Donc, c'est un peu unique. Et c'est aussi du fait de ce montage un peu juridique, vraiment spécifique, qui fait que notre fonctionnement est particulier. Et c'est sous l'impulsion de la Fondation de France, en lien avec la Fondation pour la nature et l'homme, que l'école a été créée. Elle s'appelle maintenant l'École de la nature.

Donc, c'est rattaché à Branféré, mais c'est vraiment une structure spéciale qui est gérée par une association. Et c'est cette École de la nature qui va faire tout ce qui concerne la sensibilisation dans le parc, que ce soit pour le public scolaire. On reçoit des milliers de scolaires tous les ans, soit à la journée ou parfois sur un long séjour, puisqu'on a la possibilité qu'ils dorment sur le parc. C'est aussi pour les séjours de vacances.

Là, c'est n'importe qui peut réserver un séjour de vacances au parc, thématisé par âge et avec des sujets vraiment très variés. Là, pareil, les enfants, plus ou moins grands, on a des jeunes jusqu'à 17 ans, viennent passer une semaine à l'école, ils dorment sur le parc, ils vont dans le parc, ils font des veillées dans le parc, etc. Donc, c'est vraiment très riche. Et c'est aussi l'école qui assure la sensibilisation pour le grand public.

Donc, c'est vrai que c'est un montage très particulier parce que, normalement, dans un parc zoologique, il y a une équipe pédago. Souvent, il y a un animateur ou deux. Mais là, nous, on a une équipe qui est spécialisée dans l'éducation. Et là, par contre, c'est 20 animateurs et les coordinateurs. Donc, c'est des gens qui sont spécialisés. Donc, c'est uniquement le but, c'est de faire de la sensibilisation. Et le parc, en fait, devient un outil pour amener les visiteurs, donc plutôt les plus jeunes, à changer leur action pour protéger la biodiversité.

Mirabelle : Et du coup, tu aurais des exemples concrets de certaines choses que l'école de la nature a mis en place pour cette sensibilisation, que ce soit au grand public ou au niveau des écoles ?

Alexandre Pétry : Alors, si on s'intéresse aux scolaires, ce qui est vraiment au cœur de l'ambition de l'école, c'est vraiment l'immersion. C'est-à-dire, du lever jusqu'au coucher, on est... Au parc, on est dans la nature. Les jeunes vont aller nettoyer un box, puis après nourrir les animaux. Ensuite, ils vont aller dans le bois juste à côté pour aller observer avec un herbier pour aller identifier les plantes. C'est vraiment être immergé dans la nature pour devenir acteur de la nature et du coup devenir un ambassadeur de la nature. C'est vraiment des ateliers qui sont faits à la carte pour les écoles et qui sont retravaillés tous les ans pour les séjours de vacances.

Les Nuits de Branféré : une innovation respectueuse

Le concept des nocturnes sans animaux

Mirabelle : Ça m'amène à une autre question, justement. Il y a ce côté sensibilisation, mais vous avez aussi à cœur de mettre au cœur de vos actions l'expérience visiteur. Et tout ça pour en venir à ce dont on a parlé déjà en intro, les Nuits de Branféré, parce que j'imagine que ça va contribuer aussi à cette mission de sensibilisation. Donc, pour la première fois, on l'a dit, c'est vous proposez une expérience nocturne où... les animaux ne sont pas visibles. Et du coup, comment cette décision de créer une attraction dans un zoo sans montrer les animaux, est-ce que ça illustre votre approche du bien-être animal, tout en répondant aux attentes des visiteurs qui sont toujours en quête de nouvelles expériences ?

Alexandre Pétry : L'apparition des nocturnes, c'est quelque chose qui est depuis très longtemps dans les tuyaux. Même avant que j'arrive, c'était déjà en discussion parmi les équipes, et donc on a continué à en parler, vraiment mûrir le produit. C'est un peu aussi ça, des fois, on prend beaucoup de temps pour se poser et être sûr de prendre les bonnes décisions afin, encore une fois, de respecter notre identité et surtout de faire les choses bien. Donc, ça prend du temps, forcément, ça coûte aussi des investissements qui peuvent être peut-être plus importants que dans d'autres structures. Mais quoi qu'il arrive, cette idée de nocturne, en effet, c'est en partie, on en parlera sûrement après, de prolonger les jours d'ouverture. Mais c'est aussi partie de la beauté du parc et de la singularité du parc au coucher de soleil ou même la nuit. Ça, c'est des choses que justement, les animateurs ont l'habitude de vivre parce que les jeunes, quand ils sont en colo ou quand ils sont en séjour scolaire, ils vont sur le parc à la tombée de la nuit et donc ils vivent ces sensations et donc c'était de pouvoir montrer ça aux visiteurs.

Mais bon, se promener dans le noir, ce n'est pas forcément super intéressant, même si on ressent des choses. Et on s'est dit, alors on n'a qu'à éclairer les animaux et faire un safari nocturne. Et ça, ce n'était pas possible parce que les animaux, ils ont leur propre rythme. Et donc, quand vient la nuit venue, ils ont leurs propres activités. Il y a certaines espèces qui sont nocturnes et donc qui vont être plus animées, d'autres qui sont diurnes et donc elles vont aller dormir. Donc on s'est dit, non, ça ne sera pas basé sur l'animal, on fait ça déjà en journée. Et donc on a décidé de mettre en place une sorte de déambulation mise en lumière, mise en son, qui va présenter une histoire et donc cette histoire, elle repose quand même sur les fondements du parc, c'est-à-dire qu'on va parler de... On va parler de nature, on va parler de sensibilisation. Mais tout ça mis en forme de façon un peu magique, parce que c'est aussi ça l'avantage de la nuit, c'est que dès l'instant qu'on allume un projecteur, c'est tout de suite l'arbre devient magique.

La conception du parcours

Alexandre Pétry : Et donc, on a travaillé avec le studio 109 à développer cette histoire. Même il y a à peu près un an, à développer le produit, à la fois, déjà, il fallait... sélectionner ce qu'on allait faire. Puis ensuite, en sélectionnant vraiment finement le parcours. Et pour le coup, c'est sur ça que moi, j'ai beaucoup travaillé. C'est de se dire, le parcours ne doit pas impacter les animaux. Et donc, on a vraiment sélectionné le parcours au sein du parc pour qu'il passe uniquement à côté des bâtiments des animaux qui auraient été rentrés de toute façon à cette saison la nuit. Donc, ils ne sont pas dérangés dans leur espace extérieur. Et donc, c'est aussi pour ça que le parcours, oui, il n'a pas l'air logique quand on voit ça, mais en fait, le parcours, il est comme ça pour éviter de déranger les animaux.

Et par contre, on avait une espèce et juste à l'entrée, c'est les flamants de Cuba. On ne pouvait pas passer à côté, sinon il fallait mettre les visiteurs dans un tunnel. Et donc, eux, on a pris la décision de les éclairer très légèrement. C'est la scène du coucher de soleil dans l'histoire. Mais pour être sûr que ce n'est pas impactant pour les animaux, on a d'ores et déjà lancé une étude. Donc, en fait, on enregistre les comportements de tous les flamants. Et à la fin, on va analyser les données pour s'assurer qu'il n'y a pas de mise en danger de leur bien-être. Et ça, c'est vraiment ce qui caractérise notre nocturne. En tout cas, la nocturne du parc, c'est qu'on a choisi de ne pas impacter les animaux. Alors ça peut un peu surprendre les visiteurs. Ils viennent dans un parc animalier, mais ils ne voient pas d'animaux. Mais c'était notre choix de ne pas déranger les animaux et de se concentrer sur l'histoire et sur la technologie.

Mirabelle : C'est une façon de les sensibiliser, en fait, aussi, de montrer que vous faites un parcours, mais il ne faut pas déranger les animaux pour autant.

Alexandre Pétry : Voilà. Alors, c'est expliqué, en effet, quand les visiteurs arrivent en boutique. Et puis surtout, on est ouvert la journée. Donc, les visiteurs, ils sont arrivés en début d'après-midi. Ils ont pu découvrir les espèces qui sont visibles en hiver. Les champions de l'hiver, c'est les pandas roux, ceux qui dorment tout le temps, normalement l'été. Là, ils sont super actifs, les pandas roux. Donc, on redécouvre aussi le parc d'une façon différente. Et puis, une fois qu'ils ont pris plein les yeux avec les animaux, la nuit arrive et on en prend plein les yeux avec l'histoire et les lumières. Donc c'est vraiment une combinaison parfaite. Et pour les amateurs du parcabout, il y a aussi le parcabout de nuit qui est éclairé. Et là, c'est vraiment une expérience sensationnelle. On est au milieu des arbres avec des lumières de toutes les couleurs, les filets de toutes les couleurs. C'est une sensation qui est unique.

Le storytelling au service de la sensibilisation

La construction progressive de l'émotion à travers l’univers narratif des lucioles

Pauline : Ça donne vraiment très envie. Ah là là, vite, vite, vite. Bon, moi, je voudrais revenir sur cette histoire. Alors, est-ce qu'on peut un peu spoiler ? Parce que c'est ça aussi, forcément, l'expérience, elle est basée sur ce storytelling-là. Et nous, c'est effectivement ce qui nous intéresse parce qu'on le sait, une belle histoire, un beau narratif, ça crée des émotions. Et du coup, pour revenir sur l'univers narratif que vous avez créé toute l'année passée, donc, c'est un univers qui est autour des lucioles, tu le disais, avec quatre gardiens qui représentent du coup les missions fondatrices du parc, qui sont donc comprendre, prendre soin, transmettre et protéger. On est bon ?

Alexandre Pétry : C'est ça.

Pauline : Nickel.

Alexandre Pétry : Tout à fait.

Pauline : Et donc, du coup, ma question, c'est que tu nous expliques comment le storytelling devient cet outil qui vous permet donc du coup de remplir cette mission qui est de sensibiliser les visiteurs aux enjeux du vivant tout en créant… encore une fois, cette émotion et cette magie que vous promettez.

Alexandre Pétry : Ce qui est fou, c'est que l'histoire est au service de notre sensibilisation, mais la façon dont on l'a montée, c'est encore une fois au service du bien-être animal. C'est-à-dire que le début du parcours commence tout doucement parce que c'est les zones justement où on passe à proximité des bâtiments animaliers. Donc forcément, après, il y a aussi l'effet un peu pré-show où on monte progressivement dans l'émotion. En tout cas, tout le début est plutôt pour mettre les visiteurs dans le monde de la nuit. Mais donc, c'est plus léger avant d'arriver vraiment aux shows les plus importants. Et en fait, l'idée de discrétion, l'idée de... de chuchotement, d'avoir envie de suivre, on est parti sur les lucioles. Et donc, c'était déjà parce que tout le monde connaît les lucioles et c'est un peu quelque chose que tout le monde rêve de vraiment voir. C'est magique.

Pauline : C'est magique ça !

Alexandre Pétry : Et on a envie de les suivre. Et donc, on part de ça, on part de ces lucioles. Et en fait, les lucioles, elles vont nous emmener déjà dans un voyage nocturne, comme je l'ai dit tout à l'heure, mais on commence par le coucher de soleil, on découvre les lucioles, on va vers les comètes, on va vers les constellations. Donc, c'est vraiment un parcours dans la nuit.

Et ensuite, on arrive, une fois que les lucioles se réunissent et qu'on s'est écarté des animaux et qu'on peut enfin mettre du son, mettre beaucoup plus de lumière, c'est là où on va rencontrer les gardiens. Et donc là, les gardiens, en fait, ils sont figurés par des vraies espèces du parc et qui vont chacun vraiment symboliser un de nos engagements, une de nos valeurs, on va dire, une de nos missions. Et ils vont aller raconter chacun leur petite histoire, expliquer ce qu'ils représentent, comment. Et en fait, c'est comme ça qu'on reconnecte les visiteurs à l'histoire. Ces gardiens figurent les missions. C'est toujours un peu difficile de dire, ah bah oui, un parc zoologique... Il fait de la conservation. Qu'est-ce que ça veut dire exactement ? Ou, ah oui, la priorité des parcs zoologiques, c'est le bien-être animal.

Et là, en fait, nous, le bien-être animal, je spoile, j'en spoile un. Le bien-être animal, il est représenté par le panda roux. Et en fait, le panda roux, c'est un animal qui est facétieux. C'est un animal qui est un peu symbole de douceur, de rondeur. Et en fait, l'histoire explique que le panda roux, lui, il est là pour prendre soin des autres, faire attention aux autres et donc ça permet d'illustrer ce que c'est vraiment que de faire du bien-être animal et le but à la fin c'est que les visiteurs puissent choisir le gardien duquel ils se sentent le plus proche.

Ils reçoivent d'ailleurs un petit objet au début qui sert à voter et donc à la fin c'est le conseil des gardiens et donc chacun peut voter pour son gardien préféré et là, le gardien va à nouveau parler, s'exprimer au cours de ce conseil. Et en fait, moi, ce que je trouve formidable, c'est que justement, on part de concepts qui sont assez abstraits, déjà pour tout le monde, mais encore plus pour les enfants, et on arrive à les figurer par une espèce qui devient du coup le messager de la mission. Et ça, on n'arrive pas à le faire au quotidien, dans la journée. On arrive à montrer vraiment le visage du bien-être un petit peu. Et donc ça, c'est possible grâce à cette déambulation nocturne et comme je le disais tout à l'heure, à la magie que procure la nuit.

Les retours des visiteurs

Mirabelle : Vous avez déjà eu le temps d'analyser les retours clients par rapport à ça ? Visiteurs, je veux dire, que ce soit les enfants ou les parents ?

Alexandre Pétry : Alors, on n'est pas arrivé jusque-là, parce que je ne vous cache pas que mettre en place un spectacle comme ça, en déambulation, c'est très technique. Il y a un peu de travail, même si…

Pauline : On t'exagère, Alexandre.

Alexandre Pétry : On n'a pas fait ça en régie interne, le Studio 109 qui a travaillé sur ça. Mais il y a quand même eu un énorme investissement des équipes et de mettre tout ça en musique et en lumière sans faire de mauvais jeux de mots. C'est un travail vraiment de dingue. Et alors, moi, je suis un peu... Je suis mieux avec la nature qu'avec les trucs numériques, mais ça a plus tendance à mal marcher qu'un animal. Forcément, il y a toujours des petits ajustements. On peut faire un brouillard, mais ce jour-là, il y a du vent, ça ne marche pas. Forcément, il y a aussi tout ce côté technique. Donc, on s'est surtout concentrés sur ça afin d'assurer que les visiteurs vivent un spectacle de qualité. Et je pense que... tout l'après, tout l'à côté, tout ce qu'il y a autour viendra pour les prochaines éditions.

L'évolution du secteur des parcs animaliers

La vision d'avenir et les engagements nécessaires

Mirabelle : Donc, Alexandre, en tant que directeur d'un parc qui affiche, on ne l'a pas dit encore, mais zéro cage, zéro voiture, zéro faux décor et qui se positionne, ça on l'a dit, comme référence en bien-être animal. Comment est-ce que tu vois l'évolution du secteur des parcs animaliers face aux attentes justement croissantes du public en matière d'éthique animale et aussi d'expérience immersive ?

Alexandre Pétry : Merci de me poser la question, parce que c'est une question que je me pose chaque matin en me réveillant. Alors, je vais essayer d'apporter quelques éléments de réponse, mais après, je ne suis pas visionnaire. En tout cas, ce qui est sûr, c'est que les parcs zoologiques, on doit s'engager, on doit être vraiment… engagés dans plein de choses. On a d'abord nos missions. On a dit qu'on avait nos missions, la recherche, la conservation, la sensibilisation, le divertissement. On vient aussi pour s'amuser dans un parc zoologique. Ça, c'est les missions.

Le bien-être animal comme priorité

Alexandre Pétry : Mais à côté de ça, on a des engagements. Et pour moi, l'engagement le plus fort, c'est celui du bien-être animal puisque les animaux qui sont présents dans les parcs zoologiques, ils participent à la réalisation de ces missions puisque... Par exemple, nos quatre rhinocéros qu'on a au parc, ils sont des ambassadeurs qui nous permettent de récolter des financements qui vont nous permettre d'aller protéger leurs espèces dans le milieu naturel. Et puis, potentiellement, si tous les rhinocéros indiens disparaissaient d'Inde, alors ça n'arrivera pas parce que les Indiens sont très forts en conservation, mais on pourrait éventuellement prendre leurs descendants pour les remettre dans la nature. Donc ça, c'est comment ces animaux... participent aux missions, mais ces animaux, c'est aussi des individus, ils ont chacun leur personnalité, et nous, ils sont sous notre responsabilité.

Et donc, on a un vrai engagement face à ces animaux, c'est de leur offrir les plus grands standards de bien-être animal. Et pour ça, ça passe par des données qui doivent être objectives, donc validées scientifiquement. Il ne faut pas hésiter à faire rentrer des personnes extérieures au parc, des cabinets d'études, des journalistes, même éventuellement des philosophes des sciences. Il faut qu'on soit le plus ouvert possible et le plus transparent. Je pense que c'est là où on doit progresser, c'est sur la transparence. Ça permet d'expliquer à tous nos visiteurs qu'est-ce que c'est le bien-être animal, à quel moment il peut être compromis. Et c'est OK. Nous, on ne peut pas être dans un bien-être permanent. Donc, c'est quelque chose qui est mouvant. Mais par contre, se dire que tout ce qui est mis en place, c'est pour se concentrer sur les expériences positives des animaux. Qu'est-ce que c'est une expérience positive et comment on arrive à l'évaluer pour faire en sorte que ces animaux, donc ils jouent un rôle. Ils font partie de la mission. Et nous, ce qu'on doit leur donner, c'est de faire en sorte que leur bien-être soit optimal.

La transformation des pratiques

Alexandre Pétry : Et donc, comme je l'ai dit, ça passe par l'ouverture, ça passe par la transparence, ça passe par transformer nos infrastructures, mais aussi transformer notre façon d'interagir avec les animaux. C'est-à-dire que les soigneurs, donc ceux qui prennent soin au quotidien des animaux, ont un rôle à jouer dans le bien-être des animaux. Donc c'est à la fois de l'ouverture, des meilleures infrastructures et une meilleure façon de s'occuper des animaux.

Conclusion

Pauline : Alors merci Alexandre pour ce partage. On va conclure cet épisode. On a bien compris qu'à Branféré, émerveiller ne se limite absolument pas à montrer, mais surtout à raconter et surtout à sensibiliser et encore plus faire vivre des émotions profondes. C'est d'ailleurs ce que les Nuits de Branféré illustrent, tout comme les autres activités que le parc propose. Ce concept unique permet au parc de réinventer l'expérience visiteur tout en restant fidèle à ses valeurs et ses missions fondatrices. On l'a dit, comprendre, prendre soin, transmettre et protéger. Et c'est exactement ce type de démarche qui nous rappelle que derrière chaque visite se cachent des gens, des métiers, de la passion, mais aussi une histoire qui crée des souvenirs. Et c'est cela au fond l'âme d'un parc comme Branféré. En tout cas, c'est ce que tu nous as transmis à travers cet échange. Alors, merci à toutes et à tous de nous avoir écoutés, chers auditeurs. Et puis, merci beaucoup à toi, particulièrement, Alexandre, de nous avoir partagé ton métier, un métier que tu mets en œuvre sincèrement pour le bien-être animal, ton expérience scientifique et ta volonté intrinsèque de le partager au plus grand nombre. Alors, à bientôt sur Visiteur 360, les coulisses de l'émotion. Et encore, merci beaucoup.

Mirabelle : Merci beaucoup Alexandre.

Alexandre Pétry : Merci de m'avoir donné la parole et je vous donne rendez-vous ce week-end alors pour les nocturnes.

Mirabelle : Oui oui alors ce week-end non c'est ambitieux c'est ambitieux mais le week-end prochain j'ai ma fille j'ai ma fille non non mais je te dis quand t'es en train de parler j'ai le sentiment il faut vraiment que j'y aille il faut absolument que j'y aille.

Mirabelle : Et voilà cet épisode touche à sa fin mais pas les Nuits de Branféré qui se poursuivent jusqu'au 4 janvier alors profitez-en pour découvrir cette expérience nocturne unique. Un grand merci à Alexandre Pétry pour nous avoir partagé sa vision du Parc de Branféré, son engagement pour le bien-être animal et la manière dont il repense l'expérience visiteur. Merci également à Tribus Eco Production pour l'ambiance sonore de notre podcast. Le podcast revient un mardi sur deux sur la plateforme de votre choix. Et si cet épisode vous a plu, laissez quelques étoiles, un commentaire ou partagez-le autour de vous. Et pour suivre les tendances et les coulisses du secteur, abonnez-vous à notre newsletter Entre les Lignes. On se retrouve très vite pour continuer à explorer l'univers des émotions vécues par nos visiteurs.

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